Dilatation de la masse monétaire en circulation
Par définition, l’inflation est l’augmentation de la masse monétaire. En l’absence d’une pluie d’or tombée du ciel ou d’une création de richesse, ce prodige est obtenu avec, par exemple, la baisse des taux directeurs de la BCE pour rendre le crédit moins cher, ou l’émission par l’État d’emprunt ou de bons du Trésor, essentiellement achetés par les banques nationales et compagnies d’assurance, de gré et de force.
Ces cas d’augmentation monétaire sont au départ une fiction comptable qui ne se base sur aucune réelle création de richesse, mais au mieux sur un pari de croissance.
Dilution de la monnaie
Conséquence immédiate, « l’argent » perd de sa valeur. Si la monnaie est dévalorisée, elle est du même coup moins cher, ce qui a pour effet utile de réduire la dette de l’État… et les dettes de tous les débiteurs.
Lorsque le 2 mai 2013 la BCE baisse d’un quart de point le taux refi* à 0,50%, contre 0,75% auparavant, l’avantage espéré est peut-être d’obtenir un euro un peu moins surévalué par rapport aux autres devises, de façon à ce que les exportations soient un peu moins pénalisées. Toutefois, la baisse du taux dans ces proportions n’a évidemment sur le taux de change qu’un effet purement symbolique, mais il était difficile de descendre plus bas.
Ce qui est sûr, c’est que suite à toute augmentation de masse monétaire, les producteurs de matières premières ont tendance à augmenter leur prix pour ne pas sacrifier leurs marges. Et sans même prévoir l’augmentation des prix des matières premières, une trace visible et tangible de l’inflation est l’augmentation concomitante de l’indice des prix à la consommation. Après tout, un prix n’est qu’une proportion de la masse monétaire en circulation et cette proportion reste inchangée. Mécaniquement, l’inflation se retrouve dans les rayons des grandes surfaces. Or, on assiste à un phénomène fantastique, l’Insee n’enregistre quasiment aucune inflation, à peine 2% en 2012, alors que l’émission de monnaie est continue.
L’indice des prix à la consommation « sans » hausse
L’indice des prix à la consommation (IPC) est un indicateur précieux puisqu’il détermine, en principe, le pouvoir d’achat des ménages. En effet, dans un pays comme la France où quasiment tous les consommateurs sont salariés, si l’IPC grimpe de 3 points, il n’est pas dit que leur salaire en fasse autant. L’IPC est donc déterminant pour repérer la propension des consommateurs à dépenser, à épargner ou emprunter.
Le problème est que l’IPC de l’Insee relève de plus en plus de la galéjade. Aux dernières nouvelles, malgré les injections répétées de liquidités dans l’économie, nous traversons une période sans inflation et par conséquent favorable à l’épargne. En ce sens, l’augmentation du plafond du Livret A fut une bonne opération de communication puisqu’elle s’est soldée par un réel afflux de collecte portant l’encours à plus de 260 milliards d’euros. Avec un taux net de 1,75% depuis le 1er février, le populaire compte épargne passe pour attractif au vu du taux d’inflation établi aujourd’hui à 0,7%.
Rembourser moins
Si « l’inflation », au sens médiatique du terme, est faible voire négative sur certains mois selon les dernières mesures de l’Insee (-0,1% en avril 2013), le pouvoir d’achat des Français est visiblement en net recul, grevé par des charges obligatoires devenant obèses et une augmentation générale des tarifs mal cernée par l’Insee.
L’organisme vient pourtant d’officialiser un pouvoir d’achat en recul de 0,9% en 2012, un taux que l’on peut encore qualifier de communication puisque les paramètres jouent sur les mots entre revenus disponibles et pouvoir d’achat « arbitrable ». D’autres économistes pointent un recul du pouvoir d’achat de 3,1% par ménage en 2012.
Concrètement, si l’on veut bien regarder autre chose que le prix de la balle de tennis, les charges obligatoires (logement, énergie, assurances…) augmentent et les prix de la grande distribution aussi.
Or, si à qualité équivalente, les prix au détail augmentent, la valeur des crédits s’amoindrit dans le temps. En l’absence de correction des valeurs, plus l’inflation est forte, plus l’emprunteur remboursera moins que ce qu’il a emprunté.
Un crédit moins cher
Ce contexte finalement profitable aux opérations de crédit est à mettre en parallèle avec la baisse historique des taux décidée par la BCE (Banque centrale européenne), générant sur le marché des taux de crédit extrêmement avantageux.
Par exemple, Boursorama propose actuellement un crédit immobilier de 100 000 € au TEG annuel fixe de 2,96% sur 14 ans, assurance comprise. En moyenne, les taux des crédits immobiliers enregistrés fin avril se situent autour de 3% sur 15 ans et de 3,35% sur 25 ans et leur tendance est à la baisse.
Même topo sur les crédits personnels, les offres se multiplient sur les crédits de 10 000 à 20 000 € remboursables en 24 ou 48 mois avec des TAEG fixe, hors assurance facultative de 5,7% chez BNP Paribas ou à partir de 2,90% chez Carrefour banque pour des sommes d’emprunt allant de 10 000 € sur 12 mois à 15 000 €.
Cependant, même si les banques annoncent des conditions de crédits avantageuses, elles ne sont pas (encore) autorisées à ouvrir les vannes. Les demandes de financement sont triées sur le volet et plus que jamais, en vertu des nouvelles normes prudentielles, les banques ne prêteront qu’à ceux qui présenteront suffisamment de garanties de remboursement.
S’agissant d’offres alléchantes, les banques en ligne sont attendues au tournant. Elles n’incluent généralement pas de crédits dans leur catalogue, mais elles se préparent à entrer sur ce marché dans le courant de l’année 2013, comme ING Direct. Leur arrivée pourrait bien coïncider avec une relance du crédit à la consommation. Exactement ce que disait le King, A little less conversation, a little more action please…
* Le taux refi désigne le « taux de refinancement », l’un des trois taux directeurs de la banque centrale, compris entre le taux de rémunération des dépôts (le plus faible) et le taux d’escompte (le plus fort). La BCE pilote l’inflation et le crédit dans la zone euro avec le taux refi, taux qui sert de base au crédit interbancaire. En gros, quand la BCE baisse le taux de refi, elle prête aux banques de l’argent qu’elle n’a pas mais qu’il faudra bien lui rembourser, d’où l’augmentation scripturale de la masse monétaire en circulation.